JP CHRUSZEZ : EXTERMINATION PAR LA FAIM : HOLODOMOR

mardi 12 janvier 2010.
 

HOLODOMOR

« EXTERMINATION PAR LA FAIM »par J.P.CHRUSZEZ

Au début des années trente, en Ukraine, “grenier à blé” de l’Union soviétique, le régime communiste de Staline a commis un effroyable acte de génocide à l’encontre de millions d’Ukrainiens. Nation agricole par excellence, les Ukrainiens furent condamnés à mourir de faim, une des formes de torture et de mort les plus atroces qui soit. Des quotas céréaliers exorbitants avaient été imposés par le gouvernement, allant dans certains cas jusqu’à la confiscation du dernier grain de semence. Afin de prévenir l’exode massif de la population à la recherche de nourriture vers les républiques soviétiques voisines mieux pourvues, les territoires de l’Ukraine soviétique et de la région du Kouban dans le Caucase du Nord (Russie soviétique), peuplée majoritairement d’Ukrainiens, furent isolés par des unités armées. Le résultat en fut le Génocide ukrainien de 1932-1933 que les Ukrainiens connaissent sous le nom de « Holodomor », ou “extermination par la faim”. Le pouvoir Bolchevik avait déjà expérimenté l’arme de la famine artificielle dans les années 1921-1923, profitant de la sécheresse pour créer des conditions de famine en Ukraine afin d’écraser toute résistance à son encontre. En 1932, Staline décida de vaincre les fermiers ukrainiens par la famine artificielle et d’anéantir ainsi le renouveau national ukrainien, né dans les années 1920, qui revivifiait les aspirations ukrainiennes à l’instauration d’un État indépendant. Staline avait toujours cru que “la question nationale était, par essence, une question paysanne” et que “la paysannerie constituait la force principale du mouvement national“. La famine organisée a atteint son paroxysme en hiver 1932 et au printemps 1933 : 25.000 personnes mouraient tous les jours. Le « Holodomor » a exterminé entre 20 et 25 pour cent de la population de l’Ukraine soviétique une autre conséquence effroyable du « Holodomor » fut le taux extrêmement élevé de la mortalité infantile. Dans l’espoir de sauver leurs enfants, les villageois se faufilaient à travers les barrages mis en place par les troupes du NKVD (la police politique soviétique) et les abandonnaient dans les zones urbaines, moins touchées par la famine. Ainsi, par exemple, vers la fin du printemps 1933, on recensa plus de 300.000 enfants sans-abri rien que dans la région de Kyiv. Comme les orphelinats et les refuges étaient déjà surpeuplés, la plupart de ces enfants, malades et affamés, moururent dans les rues. En septembre 1933, les deux tiers des élèves ukrainiens manquaient à l’appel dans les écoles d’État. Le génocide qui a tué des millions de gens a aussi figé l’Ukraine dans son essor en tant que nation pendant des décennies. Le « HOLODOMOR » fut un génocide : il correspond à la définition de ce crime stipulée par la Convention des Nations unies. Le régime communiste avait ciblé les Ukrainiens, au sens de nation civique, en Ukraine soviétique, et comme groupe ethnique dans la République soviétique de Russie, en particulier au Kouban (Caucase du Nord), région peuplée alors majoritairement d’Ukrainiens. Les fermiers ukrainiens n’ont pas été privés de nourriture dans le but de les obliger à rejoindre les fermes collectives ; le processus de la collectivisation bolchevique des terres était pratiquement achevé en été 1932. Le génocide par la famine a été volontairement dirigé dès l’origine contre la paysannerie ukrainienne en tant que noyau central de la nation ukrainienne qui aspirait à un État indépendant. Elle était gardienne des traditions séculaires d’une agriculture libre et détentrice de valeurs nationales ; l’un et l’autre contredisaient l’idéologie communiste et suscitaient l’hostilité débridée des dirigeants bolcheviks. Staline le soulignait en déclarant que “la paysannerie forme le gros de la troupe de tout mouvement national ; il n’y a pas de mouvement national puissant sans armée paysanne”

LA LIGNE POLITIQUE DE STALINE

en matière nationale est explicitée dans un décret qui porte sa signature, daté du 14 décembre 1932, qui lie directement le niveau insuffisant de la collecte des céréales en Ukraine et au Kouban à la politique d’ukrainisation “incorrectement appliquée” par le pouvoir local. En fait, ce décret met un terme définitif à la possibilité d’une évolution nationale en Ukraine soviétique et au Kouban, peuplé en majorité d’Ukrainiens, entamée dans les années 1920. L’objectif poursuivi par Staline était la destruction de la nation ukrainienne. Il a délibérément créé des conditions qui rendaient la survie des Ukrainiens impossible. Ces conditions correspondent entièrement à la définition du crime de génocide élaborée parla Convention de l’ONU sur le Génocide datée de 1948. Le « HOLODOMOR » n’a pas été la conséquence de la sécheresse ou d’une mauvaise récolte : celle-ci avait été satisfaisante. Le gouvernement soviétique exportait de grandes quantités de céréales et autres produits agricoles. L’URSS avait vendu à l’étranger 1,6 millions de tonnes de froment en 1932, et 2,1 millions de tonnes en 1933. Les distilleries d’Etat en Ukraine soviétique travaillaient à plein régime à cette époque, transformant le bon grain en alcool d’exportation. En fait, presque tous les Ukrainiens morts de faim auraient pu survivre grâce aux réserves stratégiques de blé de l’URSS, qui s’élevaient au moins à 1,5 millions de tonnes. Un million de tonnes de froment aurait suffi pour nourrir cinq à six millions de personnes pendant une année. Le gouvernement soviétique refusa d’admettre devant la communauté internationale l’existence de la famine en Ukraine et repoussa toute aide proposée par divers pays et organisations humanitaires internationales. De plus, ces tentatives d’aide furent dénoncées comme de la propagande anti-soviétique. Les enquêteurs qui avaient mené, sur ordre de Staline, le recensement de la population en1937 révélant une baisse drastique de la population ukrainienne due au « Holodomor » furent fusillés, alors que les résultats du recensement étaient détruits.

POURQUOI STALINE VOULAIT-IL EXTERMINEREN PARTICULIER LE PEUPLE UKRAINIEN

Eveillé par une révolution nationale en 1917-21, l’Ukraine, avec son histoire plus que millénaire et son riche héritage culturel, ses aspirations à devenir un État indépendant, forte de l’expérience acquise dans son combat pour la liberté, s’épanouissait de plus en plus rapidement sur la voie du renouveau. Dans les années 1920- 1930, des communistes ukrainiens commencèrent à réclamer plus d’autonomie de la part de Moscou. Vers la fin des années 1920, Staline sentit que les limites définies par le Kremlin pour la politique d’ukrainisation avaient été outrepassées, et que celle-ci avait perdu de son utilité pour le régime. L’Ukraine commençait à devenir une sérieuse menace pour l’intégrité de l’empire soviétique et ses aspirations géopolitiques. C’est dans ce contexte que le régime de Staline a déchaîné une guerre ouverte contre les Ukrainiens en tant que nation. L’objectif de la famine artificielle était de détruire l’idée nationale ukrainienne d’abord en exterminant les élites nationales et leur base sociale, ensuite en transformant les paysans qui avaient survécu au « Holodomor » en ouvriers obéissants pour les fermes collectives, en fait, en véritables esclaves de l’État.

APRÈS LA MORT DE MILLIONS

d’Ukrainiens dans leur propre pays natal, les autorités déplacèrent des dizaines de milliers de familles en provenance de Russie, de Bélarus et d’autres parties de l’URSS vers les terres dépeuplées de l’Ukraine soviétique. Fin 1933, plus de 117.000 personnes avaient été implantées en Ukraine, à un rythme d’exécution du plan de repeuplement de 105 %. Tout en poursuivant le « HOLODOMOR, » le régime totalitaire stalinien mena des répressions à grande échelle contre les Ukrainiens en général. Ainsi le nombre des arrestations en Ukraine était deux fois et demie plus important en 1932 qu’en 1929, et quatre fois supérieur en 1933, atteignant un chiffre record de presque 125.000 personnes. Publié par JP CHRUSZEZ à l’adresse 02:30 1 commentaires :

castorp a dit...

Il serait grand temps que l’Europe et la France en particulier reconnaissent enfin cette tragédie, le plus grand crime commis en Europe en temps de paix au XXème siècle 10 janvier 2010 14:35

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