HOLODOMOR+76 :meurtre par la Faim , par le père Alexandre, prêtre orthodoxe en ISRAEL

lundi 7 décembre 2009.
 

chronique : Holodomor +76 = meurtre par la faim par av Aleksandr, prêtre orthodoxe (Israël) 30.11.09

Ce samedi 28 novembre 2009, l’Ukraine a commémoré le jour-mémorial du “holodomor” (assassinat en masse par la faim, en ukrainien). C’est devenu un jour national très sensible de mémoire collective cette nation à l’histoire mouvementée.

Le monde ukrainien est particulièrement présent en Israël. Ceci est dû au fait que les Juifs ont été obligés de vivre sur les marches de l’Empire russe. Les émigrations massives vers l’Amerique, l’Europe et la Palestine a partir des années de pogroms de 1880, puis, en 1990, la venue de juifs et de couples mixtes juifs-ukrainiens ont profondément marqué de la société israélienne.

Bref, ce samedi notre paroisse a naturellement célébré, en hébreu et en ukrainien, ce meurtre en masse. “Holodomor” vient de l’ukrainien “moriti holodom, c’est-a-dire “assassiner par famine”. En 1932-1933, une partie de la paysannerie et de l’élite intellectuelle du pays furent ainsi liquidées. Il semble aujourd’hui avéré que le gouvernement de Moscou ait décidé de trouver un moyen de casser les gardiens du grenier à grains et autres richesses.

Le gouvernement soviétique avait commencé par prendre des décisions relativement favorables a la culture ukrainienne (reconnaissance et promotion de la la langue).

Le 7 août 1932, le gouvernement soviétique décida par décret que quiconque s’approprierait ou volerait la propriété publique serait passible de mort. Le passage d’une société de propriétaires a celle de partage collectif eut pour conséquence de réduire drastiquement la production, mais aussi d’inciter au vol de "biens d’Etat" (produits agricoles).

Le gouvernement exigea que l’Ukraine produise une quantité de produits agricoles qu’elle ne put jamais fournir a cause de l’effondrement des structures administratives. Les conséquences furent d’autant plus dramatiques que la population ne put disposer de nourriture suffisante à sa survie, malgré de prétendues aides du gouvernement central.

Il s’ensuivit très vite une famine catastrophique dans toutes les zones agricoles. De 1932 a 1933, des millions d’Ukrainiens subirent de front cette famine qui tua entre 2,5 a 4,8 millions d’habitants. Les chiffres restent à préciser comment pour beaucoup de catastrophes qui se sont produites sous le régime soviétique et nazi dans le pays. On avance un chiffre de plus de 3 millions de personnes mortes à cause de cette famine. C’est un chiffre plausible qui prendra du temps a être confirmé. L’Ukraine a besoin de respect en ce qui concerne son histoire sur la longueur d’un siècle absolument tragique.

Cette famine voulue et programmée provoqua des épidémies comme le typhus et d’autres maladies mortelles. Les rues étaient jonchées de cadavres comme le montrent les photographies de l’époque. Le gouvernement soviétique déporta les Ukrainiens vers l’Asie centrale, ce qui affecta aussi les Tatares, les Slaves. On compte env. 1,8% de victimes juives.

Il faut donc être extrêmement prudent dans la recherche des traces humaines ; victimes du Holodomor, des meurtres nazis, soviétiques et autres seront très difficiles à déterminer avec précision.

Le problème du “holodomor” est celui du moyen utilisé par un régime politique. Il est exact que la faim a souvent été utilisée, au cours de l’histoire, pour affaiblir un adversaire et le faire céder. Mais la faim comme moyen d’extermination d’un nombre considérable d’habitants d’un même pays (à noter la mort d’autres nations ou leur déportation) procède d’un désir délibéré d’anéantir des êtres humains en supprimant toute résistance.

Les ukrainiens parlent de “génocide par la faim”. Ce terme de "génocide"a été galvaudé tout au long du XXème siècle. Il l’est bien plus aujourd’hui, flirtant sans gêne avec le choc du spectaculaire indescriptible, indicible et indécent. Mais qu’est-ce donc qu’affamer les "gènes humains pour les tuer" ?

Certains pays ont considéré que le “holodomor” appartient a cette catégorie bien que la plupart des spécialistes considèrent que le terme n’est pas exact. Au fond, on parle aussi du “génocide” des arméniens et des syro-orthodoxes par les Turcs en 1915-22.

Israël s’est toujours refusé a reconnaître ces meurtres massifs comme comparables a la Shoah dont fut victime la communauté juive au cours de la Deuxième guerre mondiale de la part des Nazis et de leurs alliés. Il s’agit, dans le cas précis d’une extermination “sans fondement et pour la seule raison d’être juif”. Oserait-on parler d’"une Shoah par famine" ? D’autant qu’il est bien difficile de classer les victimes par origine.

Il s’agit bien d’un “meurtre prémédité d’une nation par le "moyen de la faim”, ce qui constitue, pour un XXème siècle particulièrement sophistiqué dans ses actions destructives de la vie humaine, un exemple de violences diaboliques.

Le Holodomor reste un moment particulièrement dramatique, aux allures de "25ème heure", du XXème siècle. Peut-on réduire ces tragédies à des particularités nationales ou ethniques ? La faim souligne combien ce meurtre est essentiellement universel.


mourants 1933 KHERSON
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